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Le bien-être des enseignants, un atout pour le bien-être des élèves

Christophe Marsollier – docteur en sciences de l’éducation et inspecteur général de l’Éducation, du Sport et de la Recherche – replace les compétences psychosociales dans le contexte du bien-être des enseignants : comment aider ces derniers à accueillir les émotions, à faire preuve de bienveillance et à être dans l’empathie.

Pour aller plus loin, suivez le parcours Magistère « Actes du séminaire académique "Compétences psychosociales au cœur des pratiques et de l’environnement professionnel" - mai 2021 ».

Intervenants
  • Christophe Marsollier

Christophe Marsollier : 
C’est une question qui est délicate, mais qui est absolument fondamentale parce qu’on se rend compte qu’il ne peut pas y avoir de progrès dans le climat de classe quand des élèves vont mal et qu’ils ont besoin de s’exprimer et notamment de se sentir accueillis dans leurs émotions, quand il y a besoin de développer avec les enseignants un travail sur la capacité à accueillir l’émotion des élèves, donc un travail sur l’écoute active, l’écoute rogérienne, c’est-à-dire une écoute centrée sur la personne des élèves, qui demande aux enseignants de changer de posture, de quitter la posture de sachants en basculant dans une posture d’écoute.
On permet à l’élève de cheminer par l’expression de ses émotions et, par là même, le fait de nommer ses émotions.
Ce qui suppose de mieux connaître les différentes émotions, notamment les émotions destructrices, dont on ne parle peut-être pas suffisamment, que sont la trahison, le rejet, l’abandon, l’humiliation et l’injustice.
Cinq émotions destructrices qui, à mon avis, devraient faire l’objet d’un travail de formation de la part des formateurs en Inspé pour aider les enseignants à mieux maîtriser ces situations susceptibles de susciter justement ces émotions destructrices chez les élèves.
Dans le champ de la formation des enseignants à l’accueil des émotions, il y en a un axe qui est absolument indispensable à travailler pour certains enseignants qui se sentent en difficulté pour pouvoir accueillir les émotions des élèves.
C’est un champ qui engage un certain travail sur soi puisque, dès lors qu’un enfant, un jeune, un adolescent est en souffrance, il y a nécessairement du transfert et des résonances émotionnelles chez l’enseignant qui peuvent le renvoyer à son histoire de vie d’élève.
Et ce n’est pas toujours très simple, pour l’enseignant, d’accompagner un élève qui ressent des émotions qui peuvent être négatives, très désagréables.
On ne demande pas aux enseignants d’être cliniciens, mais on peut leur demander d’avoir une posture clinique, c’est-à-dire une posture d’écoute attentive, bienveillante.
Et, pour certains enseignants, ça peut être vraiment un moment délicat, un moment pour lequel ils sentent qu’ils sont dans les limites de ce qu’ils peuvent apporter à l’élève.
Cette question de l’attention à la vulnérabilité est relativement récente.
On peut dire que la crise sanitaire a révélé les vulnérabilités de nombreux élèves qui préexistaient à la crise sanitaire.
Et les enseignants eux-mêmes sont vulnérabilisés dans leur situation professionnelle, pour nombre d’entre eux, eu égard au fait que l’exercice du métier d’enseignant est devenu véritablement un métier de plus en plus complexe.
Or, on peut dire que, même si on observe beaucoup plus de bienveillance globalement à tous les niveaux de l’Institution, il y a encore des enseignants qui ne sont pas complètement dans la bienveillance vis-à-vis des élèves, parce que… pour des souffrances personnelles qui peuvent les traverser, des situations très complexes qu’ils ont à gérer, parfois, aussi, une maladresse, des mauvaises habitudes prises… Et puis aussi, dans les relations entre cadres et enseignants, des personnels d’encadrement qui ne sont pas tous toujours dans une relation constructive, positive, suffisamment bienveillante avec les enseignants.
Et j’entends énormément d’enseignants être en demande de bienveillance vis-à-vis des chefs d’établissement et des inspecteurs.
J’ai observé en 25 ans énormément de progrès à ce niveau-là, indéniablement.
Mais tout n’est pas encore parfait et je crois que nous avons encore honnêtement à nous regarder, honnêtement dans ce travail d’analyse, de prise en considération, de maladresses qui peuvent être commises et de savoir s’excuser est aussi, me semble-t-il, une compétence psychosociale qui est devenue absolument essentielle.
La notion de bien-être est une notion complexe et c’est une notion qui renvoie principalement à la satisfaction des besoins fondamentaux, qu’il s’agisse du besoin d’être reconnu dans son travail, d’être sécurisé dans la relation avec les collègues, d’être soutenu, d’être considéré à la hauteur de son engagement.
C’est aussi la satisfaction de ses attentes.
On peut avoir des attentes précises, qui peuvent être des attentes organisationnelles, des attentes en termes d’encadrement, matérielles aussi, qui sont essentielles, qui contribuent au bien-être de l’enseignant.
Puis, bien sûr, des attentes relationnelles, puisque c’est un métier de la relation et, qu’il s’agisse de la relation avec les élèves, les familles, les collègues, on est bien dans ce métier lorsque les relations sont satisfaisantes.
C’est vraiment une variable qu’on retrouve de manière transversale dans beaucoup de recherches sur les facteurs du bien-être dans ces métiers.


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